Je ne suis pas trop adepte du masque d'escrime standard. J'ai des lunettes, les lentilles de contact j'essaye d'éviter (je ne suis pas certain que pour les yeux ce soit super-bon. Je ne les utilise que lorsque je n'ai pas le choix), je le trouve inconfortable, voire "lourd" et je me sens engoncé dedans (une claustrophobie qui ne dirait pas son nom ? non, je vous rassure...). Bref, si je peux éviter, j'évite. 

En plus, par l'encombrement qu'il représente, s'il protège extrêmement bien, il entrave une certaine forme de réalité - comme toutes les protections, d'ailleurs - 

Bon, dans les cours où je ne suis pas décisionnaire, quand je suis élève, s'il faut le porter, je le porte. 

MAIS, dans les séances que j'assure en tant qu'enseignant, j'en suis arrivé à proposer une solution alternative : Le petit masque d'airsoft. 

les petits masques airsoft que j'utilise

Pour moi, l'important est de protéger, sur le visage, les zones fragiles : les yeux, le nez, les dents, les joues et les pommettes. Une touche sur le front peut être supportée. 


Le masque

Il est composé de deux parties : les "lunettes" grillagées et le "bas de masque", qui, selon les modèles sont solidaires fixes ou amovibles. 

J'ai choisi un modèle grillagé (comme les masques d'escrime, d'ailleurs) et PAS la version visière plastique. Il est légertrès peu encombrant, propose un très bon champ de vision bien large, par son grillage devant les yeux il ne provoque pas de buée sur les lunettes du porteur (ah, encore elles !). Il permet le port confortable de lunettes de vue.

Le modèle sur la photo est très peu onéreux, pour un masque aux normes de protection. Surtout au regard du prix faramineux des masques d'escrime - quelles que soient les escrimes considérées - 


Le grillage des lunettes doit être en métal - il existe des grillages plastiques à éviter - ; Le tour des lunettes est caoutchouté, donc légèrement amortissant. 

L'intérieur du masque possède des rembourrages - légers - de protection : On peut toujours en rajouter à base de mousse supplémentaire - un peu de bricolage, facile, s'impose alors - 

Il existe d'autres modèles tout aussi performants, sans doute plus esthétiques ou plus chers, mais celui-ci me convient bien dans une logique où c'est mon association qui fournit le matériel aux pratiquants. 

Ce modèle se marie à merveille avec les [ "kits premières touches" d'escrime ] que j'utilise. Et on peut même faire de l'airsoft avec !


Pourquoi ?

Cette décision et ce choix de matériel spécifique, aussi, sont liés à un prisme particulier de l'enseignement : l'assaut.
J'en propose plusieurs formes, avec diverses conventions, qui nécessitent plusieurs aménagements matériels... 

  1. l'assaut sécurisé : Il est fait au moyen d'armes neutralisées : petits gants ou mitaines de boxe/karate, cannes et bâtons/armes d'hast/simulateurs en mousse et/ou plastique. On peut s'engager avec un risque moindre que le réel, l'assaut est "contrôlé par le matériel employé". Ce masque n'entrave pas la vision, est très léger et joue son rôle face à ces armes sécurisées. Dans tous les cas, même si l'incertitude est de mise, la touche est dosée mais on peut se lâcher dans l'action, improviser, tenter ses trucs... ! 
  2. l'assaut contrôlé prudent : il est fait au moyen d'armes neutralisées au minimum. Les mains sont nues, les pointes sont rabattues, les armes légères, les cibles adaptées, le rythme et le dosage d'engagement totalement contrôlés. On est toujours dans l'incertitude, mais le focus est la prudence et la clairvoyance de nos actions. Je préconise l'action sans masque, mais souvent les pratiquants voudront ce masque léger comme seule protection - surtout les porteurs de lunette qui ne peuvent pas les enlever -. Cet assaut contrôlé prudent est réservé à un public averti, capable de le faire, avec du métier.
Dans tous les cas, la touche au visage est une technique que j'impose de faire en parfaite conscience et parfait contrôle, dans une logique d'entaille ou de "pichenette". Moi-même ne la fait que si je suis certain du contrôle de mon geste au regard des circonstances particulières de l'assaut avec mon adversaire.

Si je pense que les pratiquants n'en sont pas capables, je la retire de la convention de l'assaut - On pourra toujours la travailler techniquement -.

Ces assauts peuvent se faire sous forme duelle symétrique, en 1 vs 1, mais aussi si en mode dissymétrique - armes différentes, 1adversaire vs 2, assauts de groupe, etc...

L'assaut est un moyen de simuler, en adaptant au mieux, diverses réalités plausibles du prisme combatif.


Démasque :


La pratique souvent habituelle, dans notre société actuelle sur-médicalisée, et dans une bonne part des activités de combat, est l'assaut, souvent appuyé
Cela vient du fait que l'on est souvent sur-protégé dans sa vie, on sait que, globalement, si on est blessé à l'entraînement, on pourra se faire soigner avec un bon niveau de réussite médicale, et que, même si on ne va pas bosser - car blessé -, on sera rémunéré quand même avec une bonne assurance ou couverture santé. D'où, parfois des prises de risques sportifs

Si on se replace dans un contexte historique où l'erreur était gravement handicapante, et où l'attention à l'autre - par nécessité de survie ou d'entraide - n'était pas nécessairement un vain mot, les gens prenaient certainement beaucoup moins de risques, mesuraient et anticipaient sans doute plus consciemment les conséquences de leurs actions, et ne prenaient de gros risques que si le jeu en valait vraiment la chandelle. Pas lors d'un entrainement ou d'un assaut, où il n'y a rien à gagner !

L'adversaire, en face, n'est pas un punching-ball, c'est un partenaire d'entrainement avant tout.

Faire reprendre conscience aux gens de la nécessité d'être prudent et conscient de l'autre, c'est peut-être pas con en 2024...
Cette digression est peut-être un peu hors-sujet, mais elle participe aussi de ma réflexion sur le "masque et l'assaut"